Dans le but de créer des cultures plus résistantes et plus productives, Leon Kochian s’intéresse à la « moitié cachée » de la plante : le système racinaire qui joue un rôle crucial sous la surface du sol. Faire gagner celui-ci en taille et en efficacité, c’est le souhait du titulaire de la Chaire d’excellence en recherche du Canada sur les systèmes de production alimentaire et la sécurité alimentaire.
Des récoltes plus abondantes, mieux adaptées aux changements climatiques et à moindre coût
Les cultures dotées d’un bon système racinaire produisent de plus abondantes récoltes, explique-t-il. Et surtout, elles peuvent croître dans des sols peu fertiles. « Nous cherchons à développer des cultures plus efficaces qui tirent pleinement parti des engrais épandus, explique M. Kochian. Ainsi, nous obtenons un meilleur rendement. »
Cette piste de solution est intéressante pour plusieurs raisons. La première est d’ordre financier, car le coût des engrais explose. Mais l’enjeu environnemental n’est pas à négliger non plus, car la production d’engrais azotés à partir de l’azote atmosphérique nécessite beaucoup d’énergie, sans compter que l’engrais phosphaté, extrait du sol, est un élément de plus en plus rare. Enfin, comme les plantes absorbent en général moins de la moitié des engrais épandus, le surplus risque de polluer les eaux souterraines et de se déverser dans les rivières et les lacs, entraînant la prolifération d’algues nuisibles.
Par ailleurs, plus le système racinaire est important, plus il absorbe d’eau, ce qui constitue un avantage considérable à l’heure où le réchauffement climatique entraîne la multiplication des épisodes de sécheresse.
Se tourner vers la haute technologie pour renforcer les racines
Dans le laboratoire de M. Kochian, financé par la FCI et situé à l’Institut mondial de la sécurité alimentaire de l’Université de la Saskatchewan (liens en anglais seulement), des dizaines de chercheurs et de chercheuses s’emploient à déterminer les variétés de cultures dotées du meilleur système racinaire de même que les gènes qui y contribuent.
Les serres sont remplies de cultivars de blé, de canola et de variétés diverses. Les chercheurs et chercheuses étudient ces cultures au moyen de microscopes spécialisés qui permettent d’observer le système racinaire dans ses moindres détails et d’un spectromètre de masse de haute technologie qui mesure les minéraux à des concentrations de l’ordre de quelques parties par milliard. À la table de manipulation, les biologistes extraient des échantillons d’ADN et d’ARN afin d’analyser les divers génotypes à l’aide de robots de manutention des liquides.
Une équipe gigantesque, des retombées impressionnantes
Des membres de l’équipe s’emploient aussi à décoder les signaux que les feuilles des plantes transmettent aux racines grâce au phloème, un tissu qui fait office « d’autoroute de l’information » chez la plante. À ce jour, ces travaux ont permis de cibler une protéine qui conduit à une croissance plus grande et plus rapide, et ce, avec moins d’engrais.
Les travaux de recherche menés par l’institut mobilise une équipe gigantesque pouvant atteindre plus de 40 chercheurs et chercheuses. Et M. Kochian prévoit des retombées tout aussi impressionnantes qui déboucheront notamment sur de meilleurs cultivars de blé, d’orge et de lentilles. « Je constate que les cultures sont plus résistantes aux changements climatiques, précise-t-il. D’ici une quinzaine d’années, je prévois l’apparition de cultures plus productives et moins gourmandes en ressources. »