Balado

Au-delà des biocarburants : l'avenir de l'aviation va dépendre de la façon dont on va miser sur le développement durable

Suzanne Kearns, professeure agrégée à l'Université de Waterloo, est une leadeuse mondiale en matière de développement durable dans le secteur de l'aviation. Pourtant, sa trajectoire n'a pas été sans turbulences.
Établissement(s)
Université de Waterloo
Province(s)
Ontario
Sujet(s)
Génie
Intelligence artificielle
Sciences sociales
Combustibles et énergie
Processus cognitifs

Suzanne Kearns a grandi à Wiarton, en Ontario, où elle s'allongeait dans l'herbe et regardait les avions de l'aéroport local prendre leur envol au-dessus de sa tête. Son rêve de s’envoler l'a menée à obtenir une licence de pilote d'avion à 16 ans et celle pour piloter un hélicoptère un an plus tard. À 24 ans, elle enseignait l'aviation à temps plein à l'Université Western. Aujourd'hui, en tant que fondatrice de l’Institut pour une aéronautique durable (WISA) à l'Université de Waterloo, elle contribue à réduire l'impact environnemental des vols et à inspirer la prochaine génération qui se professionnalise dans ce secteur.

Ce balado est uniquement disponible en anglais

Temps d'écoute: 23 min. 45 sec.

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Vous voulez en savoir plus?

  • Biographie (en anglais seulement) de Suzanne Kearns, sur le site Web de l'Université de Waterloo
  • Tout savoir sur l’Institut pour une aéronautique durable (WISA) (en anglais seulement) de l'Université de Waterloo et ses travaux de recherche (en anglais seulement)
  • Laboratoire de simulation de vol du WISA (en anglais seulement)
  • Découvrez-en plus sur Pipistrel (en anglais seulement), une compagnie de construction d'avions légers visant à fournir des solutions durables et respectueuses de l'environnement à l'industrie aéronautique
  • Découvrez-en plus sur Jeremy Wang, ancien élève de l'Université de Waterloo, et Ribbit (en anglais seulement) l’entreprise innovante qu’il a créée et qui se spécialise dans les avions sans pilote
Illustration vectorielle comprenant un assortiment d'éléments liés à la recherche et à la communication, divisés par des formes rectangulaires rouges, blanches et bleues. Les mots "10 000 expérimentations" sont écrits en noir sur un fond blanc croche.
Vous souhaitez entendre d'autres chercheurs et chercheuses parler de ce qui suscite leur curiosité, de ce qui les pousse à persévérer et à réussir?

Animateur

Vous écoutez un balado de la Fondation canadienne pour l’innovation.

(Musique d’ouverture)

Bonjour et bienvenue à « 10 000 expérimentations ». Ce baladodiffusion traite de travaux scientifiques de pointe et des joies de la découverte.

Nous nous sommes inspirés de Thomas Edison, qui aurait dit que toutes ses tentatives n’avaient pas été des échecs mais, 10 000 façons de faire, qui n’avaient pas bien fonctionné.

(Fin de la musique d’ouverture)

(Effets spéciaux : vent)

Au cours de l'hiver 1943, la pilote canadienne Marion Orr...

(Effets spéciaux : sirène de bateau)

... embarque sur un cargo en partance pour le Royaume-Uni.

(Effets spéciaux : sirène de bateau et vagues)

Elle s'apprête à rejoindre le Service auxiliaire des transports aériens.

(Effets spéciaux : cloche de bateau)

La mission consiste à transporter les avions de l'usine au front, pendant la Seconde Guerre mondiale.

(Effets spéciaux : avion au loin)

Pendant toute la durée du conflit, Marion Orr a transporté plus de 40 types d'avions différents, dont les emblématiques Hurricane et Spitfire.

(Effets spéciaux : avion Spitfire)

Elle fait partie d’un legs canadien qui peut nous remplir de fierté en matière d'aviation, et Suzanne Kearns, de l'Université de Waterloo, prolonge cet héritage.

Suzanne Kearns

Je m'appelle Suzanne Kearns. Je suis professeure agrégée à l'Université de Waterloo, et je m’y trouve surtout pour soutenir notre programme d'aviation de premier cycle. J'ai moi-même été fascinée par l'aviation tout au long de ma vie. J'ai grandi dans une petite ville...

(Effets spéciaux : grillons en été)

... appelé Wiarton, en Ontario, juste sous la trajectoire de vol de l'aéroport local. Je pointais toujours du doigt les avions et je disais à mes parents : « Un jour, je ferai ça. »

(Effets spéciaux : avion)

Ils ont fini par me dire que si c’était ce que je voulais faire, il fallait que je m'y mette. Ils m'ont inscrite à des cours de pilotage à l'âge de quinze ans et j'ai volé en solo le jour de mon seizième anniversaire. J'ai ensuite obtenu mes licences de pilote d'avion et d'hélicoptère privés le jour de mon dix-septième anniversaire. Enfin, j'ai obtenu ma licence de pilote d'hélicoptère professionnelle dans le cadre d’un programme menant à un diplôme du Collège Canadore.

Animateur

Suzanne est devenue pilote alors que beaucoup de ses camarades n’en étaient encore qu’à apprendre à conduire la voiture familiale.

(Effets spéciaux : voiture au démarrage qui s'éloigne)

Essayez de trouver du travail en tant que pilote d'hélicoptère de sexe féminin s'avérerait toutefois bien plus difficile que d'apprendre à se garer en parallèle.

Suzanne Kearns

Je ne savais pas à l'époque que les emplois de niveau débutant pour les pilotes d'hélicoptères au Canada sont dans des camps de brousse et qu'il n'y a pas de quartiers séparés pour les hommes et les femmes. C'est donc un véritable défi pour une femme de décrocher un premier emploi dans ce secteur. J'ai donc cherché à poursuivre mes études et comme il n'y avait pas de programme de pilotage de niveau universitaire au Canada, je suis allée aux États-Unis, dans une université appelée l’Université d'aéronautique Embry-Riddle.

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Depuis son plus jeune âge, Suzanne rêve de devenir pilote professionnelle. Mais des expériences peu glorieuses, tôt en tant que pilote d’hélicoptère, puis dans l'aviation commerciale l'ont obligée à revoir ses idées préconçues quant aux possibilités d’une carrière dans l'aviation. Nous y reviendrons…

Suzanne Kearns

Je suis donc retournée à Embry-Riddle et j'ai obtenu une maîtrise en ingénierie des facteurs humains et des systèmes. Après cela, je suis revenue au Canada et j'ai cherché un emploi. J'ai réalisé que le premier programme au Canada de pilotage au niveau universitaire venait d'ouvrir à l'Université Western, à London en Ontario, et que l’on y cherchait un membre du corps professoral.

Ils m'ont donc engagée comme conférencière à temps plein (j'avais 24 ans) pour y soutenir le programme d'aviation. Après cela, j'ai obtenu mon doctorat et j'ai fini par être titularisée. Je suis restée 12 ans à l'Université Western, puis j'ai déménagé à l'Université de Waterloo pour soutenir leur programme d'aviation.

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En soutenant le programme d'aviation de l'Université de Waterloo, Suzanne y est devenue la directrice fondatrice de l’Institut pour une aéronautique durable (WISA). Cet institut a vu le jour pendant la pandémie de COVID-19, comme quoi, après la pluie vient toujours le beau temps!

De fait, la COVID-19 a eu un effet dévastateur sur le secteur de l’aviation et Suzanne a été particulièrement bouleversée par les difficultés que rencontrent ses anciens élèves sur le marché de l'emploi, de même que ses étudiantes et étudiants.

(Début d’un morceau de musique)

Suzanne Kearns

C’est à nos étudiantes et étudiants que revient le commencement de WISA. Je donnais un cours et un groupe étudiant qui avait l'air triste est venu me voir pour me dire à peu près ceci : « Vous savez, les autres sur le campus nous donnent du fil à retordre et nous critiquent. Ils nous demandent pourquoi nous voulons faire partie d'un secteur qui fait partie du problème, qui contribue aux changements climatiques? »

Je me souviens qu'il m'a fallu un peu de temps pour trouver une réponse. La réponse que je leur ai donnée a été la suivante : « Vous devriez ressentir de la fierté pour le fait que l'aviation est votre passion. L'aviation rassemble le monde et apporte d'énormes avantages socioéconomiques à la société. »

Mais pour obtenir ces avantages, nous ne pouvons pas ignorer ou nier les impacts environnementaux. Ainsi, lorsque la pandémie a frappé, tous ces jeunes gens, dont beaucoup étaient mes anciens étudiants et étudiantes, étaient vraiment, vraiment en difficulté à cause de ces défis. Je les ai donc classés comme suit : une pénurie de personnel, des émissions environnementales croissantes et la troisième chose, l'évolution rapide des nouvelles technologies. [Inaudible.]

Ainsi, pendant la pandémie, j'ai commencé à contacter divers collègues, et j'avais déjà quelques collaborateurs et collaboratrices, et j'ai entamé des discussions une par une en demandant : « Parlez-moi des travaux de recherche qui vous passionnent et laissez-moi vous montrer comment ils sont directement liés à l'un des défis en matière de développement durable. »

(Fin du morceau de musique)

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Le concept de développement durable remonte à 1972 et à une conférence de l’Organisation des Nations unies sur l'environnement. La protection de l'environnement est l'un des trois piliers du développement durable. Les deux autres piliers sont le bien-être économique et les réalités sociales.

Suzanne Kearns

Nous organisons nos travaux de recherche en fonction des trois piliers du développement durable. Ainsi, dans le cadre des réalités sociales, nous regardons tout qui touche les personnes dans le système. Nous étudions donc les facteurs humains et la performance. Ainsi, nous utilisons des traqueurs d'yeux et cherchons à voir comment les gens déplacent leurs yeux dans une cabine de pilotage, ce qui pourrait être une indication du moment où ils passent du statut de novice à celui de professionnel compétent.

Nous nous intéressons également à des aspects tels que la santé mentale. La santé mentale est un énorme défi dans l'aviation, car la capacité des pilotes à voler et à utiliser leur licence dépend de leur capacité à conserver leur certificat médical.

Dans le domaine de la protection de l'environnement, il s'agit d’effectuer des recherches portant sur tous les aspects de la réduction et de l'élimination des impacts environnementaux du transport aérien et par rapport au bien-être économique, nous regroupons toutes nos applications technologiques. Ainsi, tout ce qui concerne l'intégration de la cybersécurité, de l'intelligence artificielle et de l'apprentissage automatique.

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L’Institut pour une aéronautique durable (WISA) compte 140 professeur·es, chercheurs et chercheuses. Un certain nombre d'entre eux étudient ce que Suzanne a évoqué un peu plus tôt, à savoir les facteurs humains. Les facteurs humains jouent un rôle important dans la sécurité de l'exploitation des aéronefs en vol.

(Début d’un morceau de musique et effets spéciaux : jet qui passe)

Suzanne Kearns

Les facteurs humains sont en quelque sorte la science des limites humaines. Il s'agit donc d'étudier la façon dont les êtres humains pensent, traitent l'information, assimilent l'information, ainsi que certaines limites, comme le fait de ne pas pouvoir prêter attention à un nombre illimité de choses. On ne peut pas traiter l'information aussi rapidement qu'un ordinateur et on se fatigue naturellement.

Ainsi, dans les premiers temps de l'aviation, la majorité des accidents étaient causés par les systèmes, c'est-à-dire par les avions eux-mêmes ou les moteurs, par exemple. Mais au cours des années 50, 60 et 70, nous avons assisté à une baisse spectaculaire du nombre d'accidents causés par les systèmes. En revanche, il a été beaucoup plus difficile de réduire le taux d'accidents liés aux personnes dans le système. Si vous réfléchissez à la raison pour laquelle les accidents de voiture se produisent, ce n'est pas parce que vous avez oublié comment conduire ou que vous vous êtes dit : « Je ne me soucie pas de la sécurité ». Ce n'est pas une action délibérée.

C'est parce que l'on est débordé, que les conditions deviennent si compliquées que l'on ne peut plus suivre ou que quelque chose d’anormal se produit et ce, très rapidement. C'est le même genre de choses qui se produisent dans le monde de l'aviation, ce sont des événements qui sortent de l'ordinaire. En fin de compte, le grand défi que nous devons relever du point de vue de la recherche est, que la plupart des causes de ce phénomène se trouvent dans la tête des gens, et par conséquent, lorsque vous examinez des choses comme la biométrie ou l'oculométrie ou, vous savez, d'autres applications, il s'agit en grande partie d'essayer de rendre visible ce qui est invisible.

(Fin du morceau de musique)

Animateur

(Effets spéciaux : cris d’encouragement pendant une course de ski et cloches de vaches)

Avant un parcours difficile, les skieurs alpins de compétition visualisent souvent leur chemin dans les virages.

(Effets spéciaux : skieur passant rapidement)

Bien que le parcours soit invisible, le cerveau est trompé pour penser que l'expérience est tout à fait réelle.

L’Institut pour une aéronautique durable (WISA) peut offrir une expérience similaire aux étudiantes et étudiants, ainsi qu’aux chercheurs et chercheuses, grâce à son simulateur de vol avancé.

Suzanne Kearns

Le financement de la FCI que nous avons reçu était la sorte de preuve de concept critique qui a précédé la création de WISA et la première proposition a été faite à la FCI. La proposition consistait à demander du financement pour amener un simulateur de vol sur le campus en tant qu'équipement de recherche et nous avons été ravis que la FCI soutienne cette proposition et nous avons désormais un simulateur de vol sur le campus.

Cet équipement est entièrement dédié à la recherche et nous nous intéressons beaucoup à l'utilisation de l'intelligence artificielle et de l'apprentissage automatique pour constituer des bases de données. Ainsi, lorsqu'une personne pilote le simulateur, il y a des milliers de paramètres différents qui sont collectés sous forme de données et qui renferment certaines des grandes questions que l’on se posera à l'avenir : serait-il possible pour un simulateur d'en évaluer automatiquement les performances par rapport à une base de données et de lui fournir de la rétroaction objective?

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Si le simulateur s'est révélé être un excellent outil pour les 300 pilotes en formation de WISA, il n'en reste pas moins qu'il ne quitte jamais le sol. À un moment ou à un autre, toute personne étudiant l’aviation souhaite se libérer de ses liens terrestres...

(Effets spéciaux : vent)

... et sentir le vent dans ses cheveux. Du financement supplémentaire de la FCI a permis à WISA d'acheter un avion d'entraînement unique en son genre qui s’appelle Pipistrel. Pour de nombreux élèves enthousiastes, il suffit (littéralement!) de brancher cet avion, puis de jouer avec.

(Début d’un morceau de musique)

Suzanne Kearns

Après avoir mis en place le simulateur et lancé WISA, l'un des directeurs associés qui est un professeur nommé Paul Parker et qui a dirigé une autre proposition de la FCI, un professeur nommé Mehrdad Pirnia et moi-même, nous avons introduit le premier avion entièrement électrique, c'est-à-dire un avion électrique rechargeable. Il y a beaucoup de questions auxquelles nous devons répondre avec un avion électrique pour soutenir la formation au pilotage avant de pouvoir l'utiliser dans tout le pays.

Et vous savez, lorsque nous envisageons l’avenir de l'aviation sans aucune émission, tout ne pourra pas être électrique. Nous allons… nous nous attendons à voir une combinaison de différents types de technologies et d'efforts. Ainsi, nous prévoyons des avions hybrides, puis des avions électriques à hydrogène et des carburants durables, tous travaillant ensemble, pour atteindre le niveau « émission zéro ».

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Les outils de recherche, les infrastructures et les installations seront tous essentiels à la réalisation de l'objectif « émission zéro », mais ce sont les personnes qui manient ces outils qui feront le plus gros du travail. Ce sont ces personnes engagées qui seront les moteurs de la découverte et de l'innovation. Des personnes comme Paul Parker et Elizabeth Irving. Ces deux collègues de Suzanne apportent à celle qui se décrit elle-même comme un « drôle de canard », une motivation et une inspiration constantes.

(Début d’un morceau de musique)

Suzanne Kearns

Je me considère toujours comme une professeure un peu bizarre parce que je suis comme passionnée d'aviation et j'aime l'aviation et je suis simplement heureuse d'être entourée d'esprits et de personnes faisant preuve de leadership qui sont vraiment inspirantes et avec lesquelles je peux travailler à l'université.

J'ai mentionné Paul Parker. C'est un personnage très intéressant parce que, dans sa vie personnelle, il est à la fois un pilote de planeur primé et un chercheur en environnement. Or, il n'avait jamais uni sa passion pour son passe-temps et ses travaux de recherche. Elizabeth Irving est une optométriste accomplie et une chercheuse en sciences visuelles. Elle étudie donc tous les aspects de la façon dont les gens utilisent leurs yeux pour collecter des informations et on ne penserait pas que l'optométrie sert nécessairement à l'aviation, mais essayez de piloter un avion les yeux fermés et vous verrez que c'est assez essentiel.

Il y a donc beaucoup de gens passionnés et passionnants et, plus que tout, je pense que mon cœur est avec mes étudiantes et étudiants. Je pense que c'est ce qui me pousse à faire cela, parce que si nous ne parvenons pas à trouver un moyen d'assurer un avenir durable pour l'aviation, c'est leur avenir qui est en jeu. Ils n'auront pas de carrière dans laquelle se jeter, il n'y aura plus de pilotes à l'avenir si nous ne parvenons pas à trouver un moyen de fonctionner plus efficacement.

Animateur

Suzanne s’implique beaucoup dans le fait de voir ses élèves atterrir au bon endroit. Une fois qu'ils déploient leurs ailes, elle veut que les possibilités s’ouvrent à eux, qu'ils puissent poursuivre leur passion, le tout : dans un monde durable.

Suzanne Kearns

Les étudiantes et étudiants sont au cœur de nos actions. Ils ont d’ailleurs créé une association étudiante d'aviation et, en tant que groupe les représentant tous et toutes, nous travaillons directement avec, car c'est en tirant parti de ces différentes forces et en travaillant ensemble que nous pouvons avoir le plus d'influence sur les choses.

Je pense que c’est une vision de l'avenir du secteur de l’aviation, car il s'agit de leur avenir. Ce sont eux qui façonneront et deviendront des leaders dans le domaine. Les jeunes se soucient de la planète, ils se préoccupent du développement durable, des pratiques responsables, de l'équité, de la diversité, de l'inclusion, ainsi que de la santé mentale.

Tous ces éléments sont des priorités majeures pour la prochaine génération, et cela orientera leur choix par rapport au secteur pour lequel ils voudront travailler. Il est donc important, je pense, que nous travaillions avec eux main dans la main et que nous formions une communauté. Et je pense que c'est ensemble que nous aurons le plus d’effet.

Animateur

WISA n'est pas établi depuis bien longtemps que déjà de jeunes anciens élèves sont source de fierté pour Suzanne. La région de Waterloo est reconnue pour être un pôle de créativité et d'innovation commerciale. Vous souvenez-vous de Blackberry, le téléphone mobile de prédilection il y a une quinzaine d'années? Il vient de Waterloo. Cet esprit novateur s’y trouve encore et Jeremy Wang en est le parfait exemple.

(Début d’un morceau de musique)

Suzanne Kearns

L’université de Waterloo est très fière d'un ancien élève : Jeremy Wang. Il a cofondé la compagnie Ribbit. Elle possède ses propres avions qui volent de manière autonome et qui ont pour mission de fournir des biens et des services essentiels aux communautés du Nord et aux communautés éloignées. De nombreux endroits au Canada ne sont accessibles que par voie aérienne pendant certaines périodes de l'année, en hiver notamment.

Il s'agit donc d'un outil de développement durable très important. Jeremy fait d'ailleurs partie du comité consultatif de WISA en ce moment. Il est donc très engagé et soutient ce que nous faisons. Grâce à notre programme aéronautique collaboratif (CAP), même si nous n'avons eu que deux cohortes jusqu’à présent, même si nous venons d’avoir nos premiers diplômés, nous les voyons déjà accéder à des rôles passionnants dans le secteur.

Un élément essentiel de CAP est que les étudiantes et étudiants s'inscrivent au programme de maîtrise ou de doctorat existant. Elles et ils suivent un cours que j'enseigne sur le fonctionnement de l'aviation, puis suivent un deuxième cours, qui est un cours-conseil, pendant lequel elles et ils travaillent directement avec un partenaire industriel pour résoudre un problème pratique. Aussi acquièrent-ils de l'expérience en mettant en application ces compétences avancées à un problème industriel réel.

Nous avons déjà vu certains de ces diplômés se faire embaucher par ces entreprises. C'est donc un aspect très intéressant, et qu’elles et ils semblent apprécier.

(Fin du morceau de musique)

Animateur

Jeremy n'est qu'un parmi d'autres qui réussissent à se frayer un chemin dans le domaine de l'aviation, en particulier grâce aux nombreuses entreprises aéronautiques basées à Kitchener. Des entreprises comme SkyWatch, fondée par trois anciens élèves de Waterloo en 2014. Si toutes ces personnes et organisations sont une grande source de fierté pour Suzanne, ses réalisations personnelles sont tout aussi impressionnantes.

Suzanne Kearns

Ce dont je suis la plus fière, c'est d'avoir écrit un manuel. Il s'intitule Principes de base de l'aviation internationale (Fundamentals of International Aviation) et c'était en quelque sorte mon bébé avant WISA. Vous savez, je passais beaucoup de temps dans mon sous-sol tous les jours à écrire ce manuel dont la raison d’être était que j'avais vu à maintes reprises des jeunes gens passionnés par l'aviation à qui il arrivait quelque chose de grave. Ils n'avaient pas assez d'argent. Ils perdaient leur certificat médical ou d'autres circonstances les amenaient à quitter le secteur et pire encore, à un moment où l’on connaissait une pénurie de personnel dans toutes les catégories professionnelles. Je me suis alors demandé si nous pouvions renverser l'approche traditionnelle de l'enseignement de l'aviation et commencer leur formation par un vaste aperçu du fonctionnement de l'ensemble du secteur à l'échelle internationale.

Telle était le but de mon manuel. Aujourd'hui, il est utilisé dans de nombreuses traductions à travers le monde et c'est probablement la chose dont je suis la plus fière. Ma famille me taquine un peu parce qu'elle me dit que si tu veux être mon ami, il suffit de me dire que tu aimes mon livre et alors je réponds « oui, moi aussi je veux être amie avec vous! »

C'est comme dire à quelqu'un que son enfant est beau ou quelque chose comme ça [RIRES]. Mais c'est important pour moi parce que j'ai l'impression que c'est… Vous savez, vous mettez votre cœur et votre âme dans quelque chose et vous espérez que ce sera utile. Vous espérez que quelqu'un dans le monde pourra l'utiliser et se dire : « Mon rêve est de devenir pilote! »

Personnellement, je n'ai pas pu atteindre cet objectif, mais j’ai touché de prêt au contrôle de trafic aérien, à la gestion d’aéroports ou à tous ces autres facteurs dont le secteur de l’aviation a besoin pour son avenir.

Animateur

Malgré son succès apparent, Suzanne vous dira que la vie n'est pas sans défis. Apprendre à pivoter lui a apporté des opportunités qui n'auraient jamais vu le jour sans les défis et obstacles antérieurs.

Suzanne Kearns

Lorsque j'étais adolescente et que je faisais partie des cadets de l'air, je voulais devenir pilote militaire. Je pensais que c'était la chose la plus cool au monde. Mais on ne recrutait pas les personnes portant des lunettes.

J'ai donc envisagé d'autres options et je me suis concentrée sur le fait que je voulais devenir pilote de ligne à ce moment-là. J'ai donc effectué un stage auprès d'une compagnie aérienne aux États-Unis et, pendant quatre mois, j'ai été pilote stagiaire. Je n'avais jamais rencontré aucun des défis du secteur de l'aviation, et vous savez, c'était il y a 25 ans, mais j'ai vécu beaucoup de situations inconfortables dans la cabine de pilotage dans laquelle je me suis sentie un peu isolée… Certaines choses étaient dites et suggérées, ce qui m'a beaucoup choquée.

Et cela a été une véritable gifle à ce moment-là de ma carrière. J'ai donc dû passer par ce processus de remise en question : j'aime le secteur de l’aviation, c'est là que se trouve mon cœur, c'est ce que je veux faire. Mais je ne sais pas si je suis fait ou si je suis la mieux placée pour être pilote de ligne.

(Début d’un morceau de musique)

C'est à ce moment-là que je suis retournée à l'école pour étudier les facteurs humains. Mais entre ces deux épisodes, il y a eu probablement trois mois de stress et de remise en question pour essayer de comprendre ce qui allait se passer.

Le conseil que je donne souvent à mes étudiantes et étudiants est donc, lorsque vous rencontrez des obstacles (et cela arrivera toujours, parce que quiconque a réussi quelque chose dans la vie a échoué plus souvent qu'il n'a réussi).

Et donc, je pense que ce qui est vrai pour tout le monde, c’est qu’il ne faut pas prendre un pas de recul, mais changer de direction et faire un autre pas en avant. Cela m’a été vraiment essentiel parce que j'aurais pu tout abandonner. Mais au lieu de cela, on voit un nouvel objectif. Je ne vais pas devenir pilote, peut-être que si je pivote légèrement, cela m'emmènera dans une direction différente. J'ai vraiment l'impression aujourd'hui que je fais ce que je suis censée faire.

(Fin du morceau de musique)

Animateur

Combien d'entre nous ont le sentiment de faire ce qu'ils sont censés faire?

Daniel Pink, auteur du livre Drive, affirme que la passion engendre la motivation. Il est convaincu que l'on aime ce que l'on fait si l'on a la possibilité de contrôler ce que l'on fait, ainsi que la possibilité d'apprendre et de se développer, puis de combiner ces deux éléments avec un objectif global. La passion de Suzanne pour son travail, comme elle le dit elle-même, « l'allume ».

Suzanne Kearns

Je pense que nous passons tous trop de temps au travail pour faire quelque chose que nous détestons ou qui ne nous éclaire pas. Je pense donc que la question à poser aux jeunes est la suivante : qu'est-ce qui vous éclaire ? Quand vous en parlez, que sentez-vous au fond de vous. C'est excitant. Vous sentez cette petite étincelle. Vous sentez qu'il y a une concordance entre ce que vous aimez et vos compétences, et vous essayez de trouver le juste milieu.

Si vous trouvez quelque chose qui vous passionne, vous pouvez aller de l'avant et le faire sur un chemin qui vous offrira de nombreuses autres opportunités, qui vous ouvrira de nombreuses autres portes pour les étapes suivantes.

Animateur

Suzanne a contourné les obstacles et franchi de nombreuses portes pour se retrouver là où elle est aujourd'hui, à la fine pointe de l'aviation durable. Bien que l'aviation ait ses nombreux détracteurs et que les nouvelles environnementales quotidiennes puissent être décourageantes, ce qu'elle voit se passer dans les coulisses des établissements de recherche canadiens lui donne en fin de compte, des raisons d'être optimiste.

(Début d’un morceau de musique)

Suzanne Kearns

Il y a beaucoup de défis à relever dans la vie. Et je pense que si l’on prête attention aux médias, il y a beaucoup de choses qui peuvent causer des préoccupations.

Les changements climatiques peuvent faire peur à beaucoup de gens et les inquiéter pour leur avenir, et je pense que c'est la réalité. Mais il y a beaucoup de gens, des gens vraiment inspirants et passionnés qui consacrent tout ce qu'ils ont, à essayer de soutenir le développement durable. Je pense que c'est ce qui me donne une source d'inspiration pour l'avenir, que le grand public ne voit peut-être pas, c'est le nombre de choses passionnantes qui se passent dans les universités et le nombre de jeunes, donc d'étudiantes et d'étudiants de premier et de deuxième cycles, qui sont en quelque sorte motivés et poussés par leur passion pour essayer de résoudre certains de ces problèmes, et ce n'est que lorsqu'ils s'unissent tous que nous pouvons avoir une vue d'ensemble.

WISA n'a que deux ans et demi d'existence. Nous sommes encore relativement nouveaux et nous avons assisté à de tels changements dans la société et dans le milieu… Le développement durable est devenu une priorité absolue pour l'aviation... un tel changement s'est produit.

J'ai le sentiment que ma force motrice personnelle est de soutenir la prochaine génération de professionnels de l'aviation dans la construction et le remodelage de la prochaine génération du secteur de l’aviation. C'est la raison pour laquelle je fais ce que je fais.

Animateur

Vous avez écouté un balado produit par la Fondation canadienne pour l’innovation.

La FCI est un organisme à but non lucratif qui verse des fonds aux universités, collèges, hôpitaux de recherche et établissements de recherche à but non lucratif du Canada, pour qu’ils investissent dans l’infrastructure de recherche.

Si vous voulez en savoir plus, consultez notre site Web : innovation point C. A.

Je m’appelle Greg Pilsworth. Merci d’avoir été à l’écoute. Au revoir.

(Fin du morceau de musique)