Balado

Les plans d’eau devraient-ils avoir le même statut juridique que les personnes?

Kelsey Leonard, membre de la Nation Shinnecock et fondatrice du Laboratoire Wampum à l'Université de Waterloo, est à la barre de travaux de recherche sur les océans, l'eau et la justice climatique.
Établissement(s)
Université de Waterloo
Province(s)
Ontario
Sujet(s)
Sciences de la terre
Écologie
Environnement

Shinnecock est un dialecte dérivé de la langue algonquienne. Le terme signifie « peuple des rives rocailleuses ». C'est le long des rives rocailleuses de la Nation Shinnecock faisant face à l'Atlantique, sur la côte est de Long Island dans l'État de New York, que Kelsey Leonard a développé sa passion pour l'eau. Ses études de premier cycle l'ont conduite à Samoa et ses études supérieures l'ont amenée à l'Université de Waterloo. C’est là qu’elle devient titulaire de la chaire de recherche du Canada sur les eaux, le climat et la durabilité pour les populations autochtones.

Ce balado est uniquement disponible en anglais

TEMPS D’ÉCOUTE: 24 minutes, 08 secondes

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VOUS VOULEZ EN SAVOIR PLUS?

Site Web de Kelsey Leonard y compris son célèbre TEDTalk : Why lakes and rivers should have the same rights as humans (en anglais seulement).

Laboratoire WAMPUM : Un cadre autochtone pour faire des progrès en matière de protection de l'eau potable face à l'élévation du niveau de la mer (en anglais seulement).

Découvrez-en plus au sujet du legs de la Nation Shinnecock et de sa connection avec la mer (en anglais seulement).

Illustration vectorielle comprenant un assortiment d'éléments liés à la recherche et à la communication, divisés par des formes rectangulaires rouges, blanches et bleues. Les mots "10 000 expérimentations" sont écrits en noir sur un fond blanc croche.
Vous souhaitez entendre d'autres chercheurs et chercheuses parler de ce qui suscite leur curiosité, de ce qui les pousse à persévérer et à réussir?

Animateur :

Ceci est un balado de la Fondation canadienne pour l’innovation.

(Musique d’ouverture)

Bonjour et bienvenue à « 10,000 expérimentations ». Ce baladodiffusion traite de travaux scientifiques de pointe et des joies de la découverte.

Nous nous sommes inspirés de Thomas Edison, qui aurait dit que toutes ses tentatives n’avaient pas été des échecs, mais 10 000 façons de faire, qui n’avaient pas bien fonctionné.

(Fin de la musique d’ouverture)

(EFFETS SONORES)

Kelsey Leonard :

Aquay, wunne kesuk. Salut. Bonjour. Je suis ravie d'être parmi vous. Je m'appelle Kelsey Leonard. Je suis professeure adjointe et titulaire de la chaire de recherche du Canada sur les eaux, le climat et la durabilité pour les populations autochtones à l'Université de Waterloo et je suis une citoyenne inscrite de la Nation Shinnecock. Notre territoire traditionnel se situe à l'extrémité est de Long Island.

(EFFETS SONORES)

Animateur :

La Fondation canadienne pour l'innovation est un organisme canadien de financement de la recherche. L'Université de Waterloo est bénéficiaire d'un financement de la FCI et Kelsey Leonard, chercheuse dans cet établissement, est juriste et spécialiste de l'eau. Kelsey a fondé et dirige aujourd'hui le Laboratoire Wampum de l'Université de Waterloo, un laboratoire scientifique autochtone qui se penche sur la justice en matière d'océan, d'eau et de climat. Ce qui est tout à fait approprié, car bien avant de faire du Canada son chez elle, elle habitait les rives rocailleuses de Long Island, dans l'État de New York, qui font face à l'Atlantique.

(EFFETS SONORES : Vagues et mouettes)

Kelsey Leonard :

Notre territoire actuel est situé juste à côté de l'océan Atlantique, nous vivons donc sur une péninsule entourée d'eau. Nous sommes des gens de la baie. Nous sommes des pêcheurs. Nous sommes historiquement connus pour avoir été parmi les baleiniers et les marins les plus renommés au monde.

Dans notre langue, Shinnecock signifie en fait « Peuple des rives rocailleuses » et je pense donc que nos ancêtres avaient une vision clé de ce que signifiait le fait de s'appeler ainsi,

(EFFETS SONORES)

en termes de protection du littoral, de protection de l'eau, de compréhension du privilège que nous avons d'être des peuples côtiers et du fait que ce privilège s'accompagne de devoirs et de responsabilités en matière d'entretien et d'intendance, etc.

(Début d’un morceau de musique)

Beaucoup de gens me demandent souvent, en tant que scientifique de l'eau, si j’ai su dès mon plus jeune âge que je voulais étudier l'eau ou que je voulais faire ce travail. Je pense que j'ai toujours été une personne d'eau. Je suis née dans un lieu et une communauté aquatiques. Mais je ne pense pas avoir su tout ça très tôt. Vous savez, si vous m'aviez demandé il y a 15 ans, si j’allais devenir une scientifique de l'eau dans le milieu universitaire, je ne pense pas que j'aurais répondu cela. En fait, je me souviens très bien pendant mes études de premier cycle , eh bien je me disais : « Je ne vais pas être l'une de ces personnes qui restent dans le milieu universitaire et qui sont si déconnectées. Pourtant, je suis restée dans le milieu universitaire. En revanche, fidèle à mes idées de jeunesse, je ne suis pas déconnectée. »

(Fin du morceau de musique)

Animateur :

Alors qu'elle était étudiante à l'Université Harvard, Kelsey s'est rendue sur une minuscule île volcanique située à mi-chemin entre Hawaï et la Nouvelle-Zélande pour nourrir son intérêt et sa curiosité grandissants pour les droits relatifs à l'eau des populations autochtones.

(EFFETS SONORES : Jet)

Kelsey Leonard :

Vous savez, je me suis vraiment concentré sur la protection des droits des autochtones, et j'en suis venue à un moment unique de mon cursus universitaire, lorsque j'étudiais à l'étranger,

(Début d’un morceau de musique)

que je vivais à Samoa, dans le Pacifique Sud, dans un village où l'eau devait être acheminée par cycle. Pendant une semaine donnée, ils n'avaient donc pas d'eau car elle était acheminée vers d'autres parties de l'île et j'ai été frappée par le fait que c'était la même expérience que celle à laquelle j'étais confrontée dans ma propre réserve. Certaines familles de ma réserve n'avaient pas accès à une quantité d'eau suffisante et de qualité suffisante pour subvenir à leurs besoins quotidiens et je me suis demandé : « Quel est le dénominateur commun malgré le fait d'être à 30 000 kilomètres de chez soi ? Qu'avons-nous en commun qui fait que nous sommes confrontés aux mêmes insécurités et aux mêmes luttes ? » Il s’agissait vraiment de mettre le doigt sur nos expériences communes. Je suis revenue sur le continent après cette expérience et j'ai commencé à poser des questions sur l'historique de la législation de l'eau, de la gouvernance de l'eau, sur le colonialisme, et cela m'a conduite sur le chemin sur lequel je suis aujourd'hui.

(Fin du morceau de musique)

Animateur :

La passion croissante de Kelsey pour la science et les questions sociétales liées à la gestion de l'eau l'a ramenée de l'autre côté de l'océan Pacifique, puis de l'autre côté de l'océan Atlantique, dans ce qui est possiblement la meilleure université du monde.

(EFFETS SONORES : Cloches de Big Ben)

(Début d’un morceau de musique)

Kelsey Leonard :

Lorsque j'ai terminé mes études de premier cycle, j'ai commencé à chercher des programmes d'études supérieures qui me permettraient de renforcer certains aspects scientifiques, écologiques et hydrologiques. Il n'y avait pas beaucoup de programmes d'études supérieures spécialisés dans le domaine de l'eau et l'un des meilleurs programmes à l'époque était celui de l'Université d'Oxford.

Ce programme en particulier permettait de se spécialiser dans la gestion et les politiques reliées aux sciences de l'eau. Cela permettait donc d'aborder les aspects juridiques et politiques, l'hydrologie et la science, mais aussi l'économie et la gestion. Pour moi, c'était un programme passionnant qui me donnait une bonne base pour approfondir ces sujets.

(Fin du morceau de musique)

Animateur :

L'Université d'Oxford est classée meilleure université du monde depuis 2017. Les étudiants étrangers comme Kelsey représentent environ 46 % des cohortes étudiantes totales qui viennent de plus de 160 pays et territoires. Pendant son séjour à Oxford, Kelsey s'est retrouvée entourée et immergée par des personnes partageant les mêmes idées, qui s'intéressent toutes passionnément à une justice mondiale en matière d'eau.

Kelsey Leonard :

L'Université d'Oxford elle-même rassemble des étudiantes et étudiants du monde entier, et il y en avait donc de l'Europe au sens large, du Royaume-Uni et d'autres parties du monde. Le simple fait de découvrir leurs différentes expériences en matière de gouvernance de l'eau a eu sur moi un effet considérable. Ce programme nous a permis de nous rendre compte, comme la plupart des spécialistes de l'eau vous le diraient aujourd'hui, que les problèmes liés à l'eau sont ce que l'on appelle des « problèmes difficiles ». Ils sont très complexes, très nuancés et très interconnectés.

Animateur :

La Loi américaine sur la qualité de l'eau est la principale loi régissant le contrôle de la pollution et la qualité des cours d'eau de la nation. Par le passé, on entendait par là les ruisseaux, les zones humides, les rivières, les lacs et les eaux côtières.

Kelsey Leonard :

Pendant cette période à Oxford, j'ai rédigé mon mémoire de maîtrise sur la Loi sur la qualité de l'eau et les dispositions de cette loi qui s'appliquent aux nations autochtones.

Cette recherche m'a permis de constater qu'il y avait des failles et des lacunes juridiques, ce qui m'a amenée à poursuivre des études de droit après ma maîtrise. J'ai donc obtenu un doctorat en droit avec une spécialisation en droit de l'environnement au cours de laquelle j'ai travaillé sur la Loi sur la qualité de l'eau.

Animateur :

Forte de cette formation juridique et de ses études sur l'eau, Kelsey est retournée aux États-Unis pour mieux comprendre l'application de la Loi sur la qualité de l'eau dans le cadre de la législation autochtone relativement à l'eau.

(Début d’un morceau de musique)

Kelsey Leonard :

Ce que j'ai découvert au cours de mes études de droit, c'est que la plupart des cas portant sur des questions liées à la législation de l'eau pour les autochtones aux États-Unis sont des affaires de « première impression », ce qui signifie que les juges prennent des décisions par rapport au point qui leur est présenté au tribunal sans pouvoir se référer à des décisions précédentes ou à des mises en application antérieures du droit pour chercher des éclaircissements, car il s’agit de points qui n'ont jamais été présentés devant une cour auparavant.

Leurs greffiers, généralement pas les juges eux-mêmes, mais leurs greffiers se tournent vers la littérature pour éclairer leurs décisions. Je me suis donc demandé où se trouvait la littérature que ces personnes allaient consulter sur nos droits autochtones relatifs à l'eau, et il n'y avait pas vraiment de littérature à l'époque, alors je me suis dit : « Eh bien, il me semble que je devrais probablement faire un doctorat », parce que ce sont les personnes qui écrivent la littérature que les juges consultent.

(Fin du morceau de musique)

Animateur :

Lorsque Kelsey a commencé à explorer les possibilités de doctorat, une université canadienne a piqué sa curiosité. Elle a été particulièrement attirée par les travaux du professeur Dustin Garrick, qui avait été chargé de recherche devinez où ? Oxford! En fin de compte, il avait lui aussi « traversé l'étang » pour venir au Canada pour occuper un poste de chercheur-professeur en politiques relatives à l'eau à l'Université McMaster, à Hamilton, en Ontario.

Kelsey Leonard :

J'ai examiné quelques programmes spécialisés dans l'eau à l'époque, au niveau du doctorat, et j'ai été particulièrement intéressée par le programme offert par McMaster qu'un professeur, Dustin Garrick, avait créé. Il s'agissait d'un programme vraiment novateur qui me permettrait d'acquérir une expérience transfrontalière entre les États-Unis et le Canada dans le contexte des Grands Lacs, ainsi que d'autres eaux transfrontalières. Le programme m'a vraiment attirée. C'était un endroit idéal pour commencer mon doctorat.

Animateur :

Après son doctorat, Kelsey a fondé le Laboratoire Wampum. Celui-ci étudie la sécurité de l'eau à l'heure des changements climatiques et de l'élévation du niveau de la mer...

(Début d’un morceau de musique)

… et c'est un laboratoire scientifique autochtone qui se concentre en particulier sur la façon dont ces défis mondiaux touchent les communautés autochtones et d’autres communautés marginalisées.

Kelsey Leonard :

Nous travaillons généralement dans le cadre de trois piliers : la justice océanique, la justice climatique et la justice de l'eau. Ces disciplines sont souvent liées à ce que nous connaissons plus communément sous le nom d'« objectifs de développement durable ». Cela a toujours été des fils conducteurs tout au long de ma carrière de chercheuse et de mes efforts, et c'est donc tout naturellement que j'ai décidé d'en faire les piliers du laboratoire et du travail que nous continuons à faire.

Dans le domaine du climat, nous nous efforçons également d'étudier la science de l'adaptation au climat. Nous cherchons à savoir comment les communautés s'adaptent, en particulier les communautés autochtones; et comment elles font entendre leur voix par rapport à la manière dont elles élaborent des solutions. Mais nous nous efforçons également de répondre aux questions et d’en faire le tour. Nous espérons parfois obtenir des réponses, parfois nous n’en obtenons pas, mais nous nous efforçons d'explorer les questions à leurs côtés et grâce à leur leadership en matière de changements climatiques et à la lumière de certaines des répercussions dont ils subissent les effets et que nous observons aujourd'hui.

(Fin du morceau de musique)

Animateur :

Certains pourraient qualifier ces « répercussions subies » de crise. Si nous consultons le dictionnaire,

(EFFETS SONORES : page d’un livre tournée)

Le terme « crise » est défini comme suit :

(EFFETS SONORES : page d’un livre tournée)

« Une situation ou une période caractérisée par une difficulté, une insécurité ou un danger intenses... »

Kelsey craint que le mot « crise » lui-même ne perde sa pertinence et sa signification.

Kelsey Leonard :

Je me débats avec le langage de la crise. Je pense que d'autres scientifiques spécialisés dans l'adaptation au climat ont probablement aussi du mal à utiliser ce langage, car nous avons l'impression de crier dans une boîte noire et que personne ne peut nous entendre. Vous savez, dans son rapport 2020, le Fonds mondial pour la nature (WWF) a constaté que nous avons perdu plus des deux tiers de la biodiversité mondiale et que le déclin le plus dramatique s'est produit dans les écosystèmes d'eau douce; et donc, sommes-nous dans une crise de l'eau pour les êtres qui dépendent de cet écosystème d'eau douce ? Oui. Sommes-nous dans une crise de l'eau pour la sécurité humaine ? Oui.

Quand une si grande partie de la population mondiale est incapable d'accéder à une quantité et à une qualité d'eau suffisantes pour répondre à ses besoins quotidiens... Il ne s'agit pas de pouvoir faire sa lessive à la maison et de prendre une douche autant de fois par jour que l'on veut. Il s'agit des nécessités de base que sont le lavage des mains et l'hygiène, et il ne s'agit peut-être même pas d'un besoin quotidien. C'est peut-être quelque chose que nous essayons juste de faire faire aux gens, sans parler d'un besoin quotidien, du moins quelques jours par semaine vous savez.

Animateur :

Les équipes de recherche du Laboratoire Wampum adoptent une approche autochtone pour étudier ces problématiques. Dans le passé, les savoirs autochtones ont été rejetés au profit de l’adoption de méthodes scientifiques occidentales. Mais aujourd'hui, de nombreux chercheurs et chercheuses tentent de bâtir des ponts, de tresser ensemble diverses connaissances traditionnelles afin d'aider à résoudre des problèmes de recherche complexes de manière collaborative et complémentaire.

(Début d’un morceau de musique)

Kelsey Leonard :

J'essaie de m'inspirer à la fois des savoir autochtones que je connais et qui m'ont été enseignés, et de ces autres formes de connaissance scientifiques qui peuvent inclure la science occidentale, qui peuvent inclure d'autres traditions scientifiques d'autres communautés dans le monde.

Je pense que souvent notre science, et en particulier nos pratiques scientifiques, sont saturées. Pour moi, il ne s'agit pas nécessairement d'essayer de faire se chevaucher des points de vue contradictoires entre les deux. Il s'agit plutôt d'essayer de trouver l'imbrication de tous les éléments afin que, lorsque je propose une solution ou que je travaille avec d'autres, nous puissions puiser dans toute la diversité de travaux et de nos visions du monde pour parvenir à une solution scientifique qui englobe et respecte toutes ces différentes traditions.

(Fin du morceau de musique)

Animateur :

Kelsey pense que l'une des solutions par rapport à l'injustice relative à l'eau est d'accorder à l'eau le statut de personne juridique. Elle veut utiliser le droit de la Terre pour accorder des droits relatifs à l'eau, à l'instar des droits juridiques accordés aux entreprises devant les tribunaux.

Kelsey Leonard :

J'aime à considérer le droit de la Terre comme un arbre. Sur cet arbre, il y a donc toutes ces branches. L'une de ces branches s'appelle les droits de la nature et ce que disent les droits de la nature, c'est que les entités naturelles ont le droit d'exister, de s'épanouir, de prospérer et d'évoluer naturellement. L'idée qui sous-tend cet argument est qu'il existe déjà, dans le système du droit commun occidental, des cas pour lesquels nous reconnaissons la personnalité juridique de non-humains tels que les sociétés.

Une société n'est pas un être humain, et pourtant nous avons créé un système juridique dans lequel nous reconnaissons la personnalité juridique de cette société afin qu'elle puisse avoir qualité pour agir devant un tribunal, ce qui signifie que vous avez le droit de faire entendre votre grief ou votre revendication devant un tribunal.

Le mouvement des droits de la nature soutient que, de la même manière que nous pouvons reconnaître la personnalité juridique d'une société, nous pouvons reconnaître la personnalité juridique de l'eau, de sorte que si cette entité naturelle est lésée, elle aurait qualité pour comparaître devant un tribunal afin que son argument, son grief, soit entendu.

Animateur :

Le message de Kelsey sur les droits des entités naturelles intéresse beaucoup de monde. À tel point que son exposé sur la chaîne TEDWomen au sujet des droits relatifs à l'eau a été vu par plus de 50 000 de personnes sur YouTube. Bien que Kelsey soit vue seule sur la scène de la chaîne TEDWomen, elle fait clairement comprendre qu'elle n'est pas seule.

(Début d’un morceau de musique)

Kelsey Leonard :

Je ne considère pas ce voyage comme un voyage individuel. Je suis ici grâce à tant de personnes passées, présentes et futures, et c'est ainsi que je continue à orienter mon travail et ma réflexion sur la recherche en tant que forme de service, de responsabilité et de réciprocité, et donc pour moi, je veux dire qu'il y a évidemment des gens qui m'ont inculqué ces valeurs, à la fois les femmes de ma famille (de mon arrière-grand-mère à ma grand-mère, en passant par ma mère, ma sœur et mes tantes), et toutes les personnes qui ont pu m'inculquer ces valeurs au sein de ma famille et de ma nation tribale au sens large.

Je peux certainement identifier de nombreux mentors et guides différents tout au long de ma vie qui m'ont permis d'être là où je suis aujourd'hui et je pense à Autumn Peltier et au travail qu'elle accomplit en tant que plus jeune commissaire en chef des eaux de la Nation anichinabée. Dans le domaine universitaire, j'ai toujours admiré quelqu'un que je compte aujourd'hui parmi mes collègues : Deb MacGregor, et le travail qu'elle a accompli pour façonner le domaine de la gouvernance des eaux autochtones.

J'aime aussi beaucoup le travail de Robin Wall Kimmerer, que j'ai la chance de compter aussi parmi mes collègues et avec qui je travaille sur certains projets. Et il y a donc beaucoup d’Autochtones formidables qui font du bon travail. Il y en a certainement d’autres auxquels je pense souvent et dont je loue le travail de terrain qu'ils ont défriché pour que nous puissions tous l’emprunter.

(Fin du morceau de musique)

Animateur :

Lorsque Kelsey parle du travail de fond réussi par d'autres, cela lui fait penser à une citation de Sir Isaac Newton, qui a dit « Si j'ai vu plus loin, c'est en me tenant sur les épaules de géants ». Dans certains milieux de la recherche, cette phrase en est venue à représenter le progrès scientifique. Cependant, le progrès ne se produit pas sans expérimentation et sans persévérance (et parfois échec). Kelsey a un point de vue unique à cet égard.

Kelsey Leonard :

Je ne considère pas comme un échec le fait de ne pas atteindre un objectif ou un but. L'échec fait naturellement partie de la vie. Nous ne pouvons pas apprécier nos réussites sans échecs et cela peut aller d'échecs très mineurs ou de ce qui peut sembler mineurs, au fait de faire l’expérience de très grandes émotions et d’activités de grande ampleur.

Ce que d'autres considèrent comme un échec n'est qu'une reconnaissance par toutes les personnes impliquées que vous n'êtes pas sur la bonne voie et qu'il faut donc pivoter, changer ou poser une question différemment. Je pense donc que lorsque je pose la mauvaise question, je ne considère pas cela comme un échec, mais plutôt comme un constat : « Bon, je n'ai pas adopté la bonne approche, alors comment pourrais-je envisager cette question autrement? »

Animateur :

La méthode scientifique peut être considérée métaphoriquement comme un sentier et il arrive que les données emmènent un chercheur ou une chercheuse sur un chemin qu'il ou elle n'avait pas l'intention d'emprunter. À ce moment-là, il peut être bon de s'arrêter, de réfléchir et de faire une petite pause.

Kelsey compte souvent sur le soutien de sa communauté…

(Début d’un morceau de musique)

… lorsqu'elle cherche une nouvelle direction.

Kelsey Leonard :

Je pense que pour moi, il est important d'avoir un bon réseau de soutien et c'est ce que j'aime transmettre aux étudiant·es et aux mentoré·es. Vous devez avoir un réseau de personnes avec lesquelles vous pouvez rire et partager vos défis, mais aussi vos succès, et qui peuvent vous permettre de trouver un espace de tranquillité physique, émotionnelle, en étant capable de faire abstraction de certaines des difficultés de notre monde afin de vous reposer un peu.

Parfois, avec la façon dont le monde fonctionne, à quel point nous sommes occupés, nous en oublions d'être... d'écouter, de nous reposer, de trouver du plaisir dans le fait que nous respirons et vivons sur cette planète, et je ne sais pas exactement comment les autres gèrent cela. Je pense que pour moi, ce qui a été rassurant et réconfortant ces dernières années, c'est d’avoir pu m'appuyer sur les connaissances et les activités culturelles de ma communauté.

Vous savez, nous sommes ici depuis des milliers et des milliers d'années et, même si la planète traverse actuellement une période très difficile, je sais que dans nos histoires et nos chansons, dans nos danses et nos rires, nous sommes capables d'avoir un lieu de répit et c'est donc là que je vais.

(Fin du morceau de musique)

Animateur :

La Nation Shinnecock de Kelsey's Leonard vit depuis des millénaires sur les rives rocailleuses de l'Atlantique. Si Kelsey puise sa force dans cette communauté…

(Début d’un morceau de musique)

… elle se sent également obligée de lui rendre la pareille.

Kelsey Leonard :

Je pense que pour moi, j'essaie simplement de rendre service à la communauté et aux personnes qui pensent que, d'une manière ou d'une autre, je peux leur être utile.

Il s'agit d'essayer de trouver des moyens d'inspirer des gens comme les jeunes militantes et militants de l'eau et du climat qui nous tiennent en haleine et qui pensent constamment à la génération actuelle et future et à la manière dont nous leur laisserons un monde vivable, sain, florissant et passionnant à vivre.

La citation de Bernard Shaw que je porte en moi depuis longtemps dit que j'espère être complètement épuisé au moment où je quitterai ce monde.

Je pense que ma réussite réside dans le fait que, si à la fin de tout cela, les autres parlent de moi en termes élogieux et estiment que nous avons construit des relations de confiance qui ont servi leurs nations et leurs communautés, alors nous aurons fait du bon travail.

(mixage musical)

Animateur :

Le balado 10 000 expérimentations est produit dans les studios de la Fondation canadienne pour l’innovation. La FCI est un organisme à but non lucratif qui investit dans l’infrastructure de recherche des universités, des collèges, des hôpitaux de recherche et des établissements de recherche à but non lucratif du Canada.

Si vous voulez en savoir plus sur la FCI, rendez-vous à innovation point c. a.

Ici Greg Pilsworth. Merci d’avoir été à l’écoute. À la prochaine!

(Fin du morceau de musique)