Le carburant représente quatre-vingt-dix-huit pour cent de la masse d’une fusée. C’est ce qui permet à celle-ci de vaincre la gravité terrestre et de rejoindre l’espace. Les deux pour cent restants découlent du poids de la fusée et de sa cargaison. Or, réduire ne serait-ce qu’une fraction de ce pourcentage permettrait de diminuer considérablement la quantité de carburant consommé. Résultat : des économies et une incidence moindre sur l’environnement.
Zheng Hong (George) Zhu, ingénieur en mécanique et en aérospatial de l’Université York, et Jun Yang, ingénieur en matériaux, en mécanique et en biomédical de l’Université Western, s’y emploient dans le cadre d’un ambitieux projet qui allie vol spatial et recherche d’applications médicales. Au lieu de charger les fusées d’équipements lourds et encombrants ‒ ce qui présente l’inconvénient supplémentaire d'avoir à tenir compte de la gravité terrestre à la fabrication ‒ et d'outils nécessaires pour réaliser des réparations ou des expériences, ils mettent au point des procédés améliorés grâce à l’intelligence artificielle en vue d’imprimer en 3D de telles pièces dans l’espace.
« Pour imprimer en 3D, il suffit de transporter les matières premières. Celles-ci ont alors un volume et une masse moindres, explique M. Zhu. Et si on arrive à imprimer en recyclant des matériaux de débris spatiaux, le coût du lancement en sera encore réduit. »
L’apesanteur nécessite d’approcher l’impression 3D de manières différentes
Les défis et les avantages éventuels de l’impression 3D dans l’espace sont liés à la microgravité et au vide. En effet, en l’absence de gravité terrestre, les métaux et les plastiques fondus au cours du processus d’impression se comportent différemment.
« Sur Terre, alors que de multiples couches sont superposées lors du processus d’impression 3D, la gravité participe à la fusion entre celles-ci, et le mouvement de l’air contribue à refroidir l’imprimante et les objets imprimés. Dans l’espace, l’adhérence est plus faible, car il n’y a pas de gravité, et le refroidissement se fait beaucoup moins facilement en raison du vide », explique M. Zhu.
L’équipe espère également mener des expériences à partir de matières premières présentes sur la Lune et sur Mars, deux destinations spatiales potentielles. Les scientifiques en savent déjà beaucoup sur la composition du sol de ces lieux, explique M. Yang.
« On pourrait se servir du sol lunaire ou martien dans les imprimantes 3D, affirme-t-il. En gros, si on veut explorer l’espace, il faut savoir comment les faire fonctionner. On ne peut pas transporter tout le matériel dont on pourrait avoir besoin. »
Grâce au financement de la FCI, l’équipe fera l’acquisition d’une chambre à vide de deux mètres carrés qui pourra héberger à la fois une imprimante laser 3D et le robot équipé d’une intelligence artificielle qui la commande. L’équipe mettra à l’essai le procédé d’impression 3D dans différentes directions en fonction de la gravité de la Terre afin de trouver des moyens de surmonter les problèmes de fusionnement résultant du vide et de l’apesanteur.
L’équipe met également à l’essai de l’impression 3D des substituts biologiques implantables, tels que des greffes de peau et d’organes, destinés à des traitements médicaux dans l’espace comme sur Terre. L’impression de tissus mous dans l’espace présente l’avantage d’éviter que leurs délicats échafaudages ne s’affaissent sous l’effet de la gravité.
« L'espace peut nous servir d'usine, estime Zhu. On fabrique le matériel là-bas et on l’expédie ici. »
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