Le Canada a besoin de la recherche pour bâtir un avenir audacieux après la pandémie
Depuis le premier jour de la pandémie et dans l’incertitude qui prévaut mondialement, la population canadienne se fie aux conseils des scientifiques. Selon un sondage mené récemment par le groupe Logit, près de 80 pour cent des Canadiennes et des Canadiens font confiance aux scientifiques, une proportion supérieure à celle enregistrée par le même sondage en janvier.
La pandémie et la réaction immédiate de la communauté de recherche canadienne vis-à-vis de celle-ci, ont renforcé le rôle crucial que joue le milieu de la recherche pour tenter de nous sortir de cette crise. Découvrir un vaccin, mieux connaître les effets de la COVID-19 sur le corps humain ou étudier l’incidence de cette pandémie sur tous les aspects de notre vie… Ce sont nos chercheuses et chercheurs canadiens qui sont nos éclaireurs et nos principales sources d’espoir.
L’avenir ne sera pas différent. Nous aurons besoin de la recherche non seulement pour traverser la pandémie, mais aussi pour redresser notre économie.
Les chercheuses et chercheurs sont formés pour sortir des sentiers battus. En réponse à la pandémie, une équipe du SNOLAB, un centre de recherche logé à trois kilomètres sous terre dans une mine de Sudbury (Ontario), dont fait partie le Prix Nobel Art McDonald, a utilisé ses connaissances en physique des particules pour collaborer à un effort international visant à concevoir un respirateur facile à fabriquer. Pendant la pandémie, des chercheuses et chercheurs de l’Université McGill et de l’Université de Toronto ont mis au point un outil novateur pour aider les travailleurs sociaux à soutenir les enfants et les adolescents en proie à des situations de violence au sein de leurs foyers. Et une équipe de l’Université de Victoria et de son partenaire industriel, Valley Acrylic, développent un revêtement pour les éviers publics qui repoussera le virus de la COVID-19 et réduira sa propagation. La reprise économique sera tributaire d’idées tout aussi audacieuses et novatrices.
Les chercheuses et chercheurs canadiens ont des idées qui pourraient faire passer notre pays du creux de la pandémie au sommet du succès. Ces idées méritent notre attention et notre soutien. Grâce à la créativité des chercheuses et chercheurs et aux investissements visionnaires du gouvernement et du secteur privé, le Canada est un chef de file en intelligence artificielle et en science quantique par exemple. Et bien nous devons maintenant tirer parti de ces investissements et continuer de financer l’ensemble du spectre de la recherche pour aider les entreprises canadiennes à exploiter cette expertise, à devenir plus concurrentielles sur les marchés mondiaux et à créer des emplois. Au lieu d’exporter nos travaux de recherche, aidons-les à s’épanouir ici, chez nous.
Nous devons employer de nouveaux moyens pour bâtir notre économie ; des moyens qui doivent à la fois être écologiques et contribuer à la santé et au bien-être de nos collectivités. De nos jours, les économies prospères misent sur les investissements en recherche et en innovation.
Au détour de mes discussions avec des chercheuses et chercheurs ainsi qu’avec des dirigeant·e·s universitaires de partout au pays, j’ai entendu dernièrement de nombreuses idées quant à la façon d’assurer un avenir meilleur à la population canadienne.
Il a notamment été question de rassembler des océanographes de toutes les zones côtières, qui chercheraient des moyens d’exploiter l’énergie des océans tout en veillant à ce qu’ils demeurent des habitats viables pour les plantes et les animaux marins, et qui analyseraient des façons d’améliorer le transport maritime tout en réduisant la pollution.
Des scientifiques ont fait valoir que la masse critique d’expertise canadienne en science quantique bénéficierait de la mise en place d’un réseau national qui rehausserait nos forces dans ce domaine.
Nous pourrions combiner notre expertise en médecine de précision à nos atouts en génomique et en neurosciences (pour ne citer que ces deux domaines) et devenir le chef de file mondiale de la recherche biomédicale.
Nous devrions également continuer à soutenir nos physiciens théoriciens qui tentent de définir la matière dont sont composés les trous noirs, de fournir des réponses à la nature de notre univers, de créer de nouvelles technologies et de nouveaux emplois, voire de remporter un prix Nobel pour le Canada.
Continuons, en tant que pays, de valoriser la recherche et d’ancrer l’innovation au cœur de nos vies.
Nous avons une communauté de chercheuses et chercheurs extraordinaire qui a la capacité et la volonté de réussir et qui a besoin de notre soutien pour relever les défis d’aujourd’hui et de demain. Les Canadiennes et les Canadiens ont démontré à maintes reprises qu’ils peuvent s’unir pour résoudre des problèmes tant en économie, en santé ou en environnement qu’en matière d’essor culturel et technologique. Malgré notre petite population répartie sur un vaste territoire, nous avons montré que nous pouvons cultiver notre ressource la plus précieuse, ce que l’écrivain Northrop Frye a appelé les Pouvoirs de l’imagination.
Le Canada est une nation d’innovation. Reconnaissons-le. Inspirons nos chercheuses et chercheurs et investissons dans leur potentiel créatif. Nous y parviendrons. Il nous faudra d’une part chercher des occasions de travailler ensemble pour façonner l’avenir, tirer parti de ce que nous avons investi jusqu’à aujourd’hui et d’autre part, cerner les ressources qui rendront les entreprises canadiennes concurrentielles en leur permettant de transformer les connaissances créées par nos chercheuses et chercheurs en un avenir meilleur pour tous.
Roseann O’Reilly Runte est la cinquième présidente-directrice générale de la Fondation canadienne pour l’innovation, un organisme à but non lucratif qui investit dans l’infrastructure de recherche des universités, des collèges et des instituts de recherche partout au Canada. Elle est l’autrice de nombreux ouvrages savants dans les domaines du français, de la littérature comparée et du développement économique et culturel. Elle est membre de l’Ordre du Canada.
Cet article est paru à l’origine dans The Hill Times le lundi 28 septembre 2020.